mercredi 3 juillet 2019

J'ai vu Miséricorde de Mikkel Norgaard d'après Jussi Adler-Olsen

Maj Juillet 2019 : Aurais-je été sévère lors de la rédactiion de cet article de 2015? Trop d'attente créée par la lecture des romans qui ont précédé ce film vod? J'ai revu avec des amis Miséricorde et les autres opus de la série de films d'après les personnages de Adler-Olsen et ça se laisse voir...


Le 14 avril 2015.

Malgré les affiches aguicheuses placardées dans le métro, ce n'est pas en voyant Miséricorde, le film de en VOD que vous aurez accès au talent de son auteur, le romancier Jussi Adler-Olsen dont je disais le plus grand bien récemment. Si la trame de l'histoire est à peu près respectée, le film a tendance à réunir tous les poncifs de la normalité télévisuelle dans sa narration de l'histoire. 

Les comédiens choisis n'ont plus grand chose à voir avec ceux dépeints par l'auteur :

Carl Morck, décrit comme grognon mais plein d'humour, caustique et irrévérencieux, d'un physique peu avenant (n'est-il pas chauve?) est présenté à l'écran sous les traits d'un rugueux playboy lugubre et d'une grande tristesse.
Assad est normalement un petit gros, qui parle et rit très fort, conduit à fond la  vieille voiture de fonction et ne comprend rien aux expressions imagées de Carl. Dans le téléfilm, il est grand, séduisant, conduit raisonnablement une 508 neuve et semble uniquement présent pour donner une bonne image des minorités au Danemark.
L'histoire prend des raccourcis bien peu valorisants.
Dans le livre, la prisonnière du caisson va se montrer bien plus rebelle que dans le pauvre téléfilm qui en est tiré. Et c'est grâce à son astuce qu'elle arrivera à la fin qui lui est réservée, pas seulement avec l’intervention des deux héros et cela change tout : comme dans les autres oeuvres de Adler-Olson, les victimes ne sont pas de pauvres marionnettes qui attendent le chevalier blanc mais des humains actifs qui se battent avec la dernière énergie.

1h30 d'un polar quelconque

au lieu d'heures de lecture avec des moments de rire, d'angoisse, d'espoir... le choix est vite fait. on se précipite sur les bouquins et ebooks et il sera bien temps de voir le téléfilm qui n'est qu'une video calibrée dont la seule différence avec les modèles habituels d'avoir été tourné au danemark. 
Qui sait, la série Département V de Jussi Adler-Olsen aura peut-être la chance d'être reprise dans quelques années par un metteur en scène avec une vraie vision, comme l a été tardivement Wallander (et finalement avec des comédiens britanniques) .
L'affiche annonce qu'il s'agit du même scénariste que Millenium (film) : même punition, même motif. On ne peut résumer des romans qui mériteraient une série en un seul film sinon à perdre tout ce qui a fait leur succès en librairie.

PS1 : pour info, le 2eme volet, proposé au cinéma cette fois (après tout, avec la mode du polar nordique...) qui porte le même nom que son inspiration écrite "Profanation" continue dans la même veine : Rose, la nouvelle assistante iconoclaste et grande gueule du roman est montrée sous les traits d'une ravissante petite poupée rousse photogénique mais... bon, vous avez compris! 

PS2 : les titres français Miséricorde et Profanation n'ont évidemment rien à voir avec la traduction des titres d'origine : "La femme en cage" et "Tueurs de faisans". Mais , après tout, Retour Vers L'enfer s'appelait "Le tieur de daims" en VO...







J'ai lu Perfidia, de James Ellroy

Quelles que soient les déclarations fracassantes qu'a faites James Ellroy sur sa résurrection, son livre le plus ambitieux, etc... Perfidia est une vraie réussite par l'immersion qu'il procure au lecteur dans  Los Angeles le jour de l'attaque de Pearl Harbour .

Se situant avant ses autres bouquins de la trilogie du Grand Nulle Part, on y retrouve ses héros policiers quelques temps auparavant, les stars hollywoodiennes du moment alors que le succès radio est Perfidia ,qui donne ce drôle de titre à l'ouvrage.

L'énergie présente dans les pages est énorme et l'écriture s'interdit toute nostagie en décrivant comment l'ignorance crasse et les préjugés des californiens de l'époque est utilisée pour résoudre tous les problèmes :  les politiciens (à la moralité vacillante mais aux grands principes), les stars de l'époque que le début de la guerre semble avoir surexcitées ou les frais débarqués de la cambrousse pour y connaitre un destin.

Comme dans les bonnes séries américaines, James Ellroy à recréé un passé à ses héros des autres livres , un passé qu'il raconte ici sur les airs de la chanson
On cherche un assassin pour un crime qui fait sensation? On va chercher un profil qui nous intéresse pour le présenter au peuple et on cherchera le véritable plus tard.
On répète que la guerre n'arrivera pas? Un bon moyen de préparer les gros gains à venir quand elle sera
déclarée.

Manipulations de chacun des protagonistes, racisme assumé et organisé, préjugés de toutes sortes, pulsions sexuelles latentes ou assumées, violence surgissant à chaque instant... Ellroy a parcouru Los Angeles toute son enfance et adolescence et semble connaitre son sujet.

Les situations mises en scènes par l'auteur sont jouissives quand on les compare avec le ton d'un journal télévisé  ou une déclaration politique de 2015. Pourtant, la quête de puissance, d'argent, de sexe était déjà dans le cœur des acteurs de l'histoire et des histoires.
Ayant lu tous les plus anciens livres d' Ellroy, je ne peux me mettre à la place du nouveau lecteur mais Perfidia est malgré tout facile à lire si on le
compare à certains de ses polars hallucinés dont le narrateur est un complet malade et il ne faut pas craindre
de cliquer sur la première page. La fin du livre affiche d'ailleurs une bio de tous les personnages et permet de situer le petit nombre de ceux qu Ellroy a mêlé aux célébrités.

        Il reste que la découverte absolue de vérité, et même de justice, est primordiale pour quelques personnages de Perfidia, et je me demande si on la rencontre toujours avec cette intensité aujourd'hui en dehors des fictions écrites ou video qu'on nous propose.

Alain Lacour / Maspalomas & Paris 2015 05 06



https://www.youtube.com/watch?v=P8MjJXvnzj4

J'ai lu "Homme sans chien" du suédois Håkan Nesser

"Homme sans chien", un polar de mœurs à l'anglaise

 Patricia Highsmith vous tenait en haleine en narrant le quotidien de personnages de plus en plus étranges. Ruth rendell, dont je regrette déja la disparition récente, nous faisait entrer dans le cerveau de quelques personnages longtemps avant de faire émerger un meurtre ou un acte dramatique.
J'ai fortement pensé à Highsmith et plus encore à Rendell en entrant dans les pensées de Rosemarie Hermansson  qui vient de faire un rêve étrange : elle doit choisir entre mourir ou tuer son mari. Depuis quelques jours à la retraite, elle est perturbée par la volonté de Karl-Eric de déménager de Suède vers l'Andalousie. Le manque de soleil n'a que peu à voir avec ce choix : il permettrait aux deux époux de ne plus souffrir la honte qui les entoure depuis que leur fils cadet, Robert,  a trouvé malin de se masturber devant la caméra de la version locale de "L'Ile de la Tentation".
http://leventsombre.cottet.org/
Robert ,lui même, se demande comment il va pouvoir assurer lors de l'anniversaire de son père et de sa chouchou, l'ainée de la famille, qui doivent fêter ensemble cet événement dans la maison familiale à quelques jours des fêtes de Noël. Le reste de la famille est attendue également : les adultes , les adolescents et même le dernier né que certains disent un peu retardé.
2 jours plus tard, deux d'entre eux auront disparu et l'inspecteur local sera chargé de l'affaire.


Mon avis.

Ah, les personnage de Håkan Nesser aimeraient bien choisir selon leur gout les devoirs qu'ils ont à remplir au cours de leur vie quotidienne et éviter ceux qu'ils voient comme des corvées. Ils aimeraient bien trouver le courage de dire "non" alors que l'habitude de se soumettre les étouffe aujourd'hui. Les plus jeunes se demandent ce qu'ils feront de leur vie et quelle sera leur avenir amoureux, sexuel, professionnel... Et ces évanouissements, ces pertes de mémoires désignent-ils celles ou ceux qui disparaitront?
L'inspecteur Gunnar Barbarotti , dont c'est ici la première apparition chez l'auteur, est chargé de l'enquête , ce qui l'arrange bien au début mais lui donnera pas mal de fil à retordre.
Dieu merci (clin d'oeil à Gunnar), Håkan Nesser a évité de faire de son héros le 101ème flic ivrogne en rémission du genre policier ou de le pénaliser d'une totale absence de succès amoureux : l'homme apporte une bienheureuse santé qui nous donne envie de profiter d'autres aventures en sa compagnie.
Quant aux autres personnages, "ceux qui en ont la force ont le devoir de supporter les épreuves".

Un excellent polar difficile à abandonner.
Homme sans chien 
Hakan Nesser
  • Traduit par Esther Sermage
    Date de parution 02/05/2013
    Seuil Policiers
    480 pages - 22.50 € TTC