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vendredi 8 novembre 2013

Série originale ou copie américaine?

 Alors qu'on a l'habitute en France de voir des séries françaises copier (mal)  les séries US, Les États-Unis rachètent régulièrement nombre de bonnes séries étrangères, non pas pour les passer telles qu'elles au spectateurs américains mais pur les refaire "au pays".
Au départ, la justification de remake était que les spectateurs américains ne voulaient ni sous-titres, ni doublages en anglais. On a admis ensuite que les américains voulaient voir dans les séries des endroits américains qu'ils pouvaient reconnaitre mais cette explication a tenu encore moins longtemps que la première. On peut certes considérer que le téléspectateur américain lambda est trop con pour imaginer ce que la vie peut-être en dehors des états-unis, on peut penser qu'il est trop égocentrique pour s'intéresser aux autres nations que la sienne, (le succès  hallucinant en France de "Trop Belle La Vie" ne démontre-t-il pas la même chose ici?), il ressort aussi que ne diffuser que des séries US aux états-unis, ne vanter que la littérature américaine, etc... est un réel ciment d'unité pour le peuple des états-unis qui conduit l'écrasante majorité locale à penser que le cinéma américain est le meilleur, les séries américaines les seules dignes d"intérêt et les États-Unis la seule vraie nation libre et démocratique au monde.
Chacun préfèrera l'hypothèse qui lui convient quant à cette volonté américaine de tout refaire à l'américaine alors que le monde netier voit les séries US dans leur cadre "naturel, il est souvent cruel pour les USA de
comparer les remakes américains à leur original :
  • Homeland fait, à mon avis, pâle figure quand on la compare à Hatufim  dont elle s'inspire de façon bien lointaine. Le personnage de l'enquêtrice est risible à force de mimiques ridicules et exagérées, le militaire soupçonné passe en quelques ssemaines de l'Irak aux élections sénatoriales, les relations humaines, amoureuses ou familiales sont stéréotypées et la menace terroriste est  ridicule quand on considère la réalité des attentats qui ensanglantent de temps à autre les états américains.
  • The Killing (2011-USA) est une version très fidèle de Forbrydelsen/The Killing/Le crime (2007_Danemark), l'original, à tel point qu'on ne voit aucun intérêt à ce remake tant la version originale se suffit à elle-même . Même paysages danois et américains, ambiance lugubre, etc...
  • Cold Case est, à mon avis,  une reprise aseptisée de "Waking The Dead/ Meurtres en Sommeil  (2000- Grande-Bretagne). Dans la reprise,  l'émotion finit par arriver grâce aux apports positif du remake : les flash-backs sur le passé, la chanson de fin qui permet de clore le "dossier froid" en représentant l'adieu final des enquêteurs à la victime à qui on a enfin rendu justice. Malheureusement, la série originale parait bien datée aujourd'hui et seuls ceux qui l'ont découverte sur Jimmy il y de nombreuses années en sont restés fans. Elle a été reprise depuis sur France2 et  Cherie25. A noter que la version d'origine, anglaise, a elle aussi de nombreuses saisons dont les dernières sont plus actuelles : les anglais aussi aiment les séries faites chez eux.
Pourtant les USA gagnent d'ores et déja la bataille entre la copie et l'original, quelle que soit la qualité de l'une ou de l'autre :
  • Décisions et mise en œuvre du remake se font dans un temps très court, la copie apparaissant souvent en international avant la version originale.
  • Il y a remake quand la qualité de l'original a attiré l'attention des compagnies américaines, mais en général, c'est plutôt le succès de la série originale qui décide de sa reprise. Aux scénaristes de se débrouiller avec l'américanisation des situations (1).
  • Le marketing est primordial quant à la promotion du futur remake. On peut davantage dépenser d'argent en publicité, teasing, buzz quand on fait le remake d"une série peu connue internationalement mais qui a fait un tabac dans un pays occidental : c'est déjà testé et approuvé par les téléspectateurs du pays d'origine. Aux scénaristes de se débrouiller avec l’américanisation des personnages (2).
  • Même si la série originale a fait un carton, le succès du remake USA conduira très rapidement à la production de saisons suivantes dans des délais bien plus court que partout ailleurs dans le monde : des centaines de scénaristes, acteurs, studios maitrisent parfaitement en Californie ce type de façon de travailler sur des séries à la mode US. Ainsi, les saisons suivantes d'un remake sortiront bien avant et seront plus attendues que celles de l'original ( La saison 2 d'Hatufim n'est pas encore traduite professionnellement en français alors qu' Homeland, la copie, travaille déja depuis octobre 2013 sur la 4ème saison qui sortira dans quelques mois.)  The Killing USA a commencé en 2011 seulement et travaille déjà sur la 4eme saison alors que The Killing (original-2007-danemark) n'en est qu'à la 3ème.
  • Les studios américains ont déjà des partenariats avec les télévisions du monde entier qui piochent chaque année dans leur catalogues, alors qu'une série danoise, israélienne ou espagnole devra se négocier à l'unité pour arriver dans chaque pays.
Ce n'est donc pas sur la publicité qu'il faut compter pour tomber un jour sur ces excellentes séries originales qui ont pu pousser les studios américains à sortir le carnet de chèques pour s'en approprier le droit au remake :
  • Arte a sorti Hatufim (1ère saison) à peu près au moment ou Homeland (le remake US) arrivait en France sur chaine à abonnement (canal+) puis sur chaine privée (D8, groupe Canal+). En revanche, la saison 2  de Homeland déja diffusée alors que la saison 2 de Hatufim, l'original, ne se trouve guère qu'en Hebreu ou en doublage artisanal français : erreurs de traductions, contresens et fautes de français à prévoir et certainement pas en VOD légale...
  • Meurtres en Sommeil est pratiquement inconnu alors que Cold Case a fait un tabac même si la veine semble épuisée. Il est vrai que la série originale devait expliquer en 2000 ce qu'était l'ADN ou les échanges de particules sur les lieux de crimes alors que Cold Case ne fait que les utiliser. Dans l'actualité aussi, ce n'est que depuis quelques années que la justice française semble s'est penchée sur de vieilles affaires avec la technologie d'aujourd'hui : en synchro avec Cold Case? Au royaume uni, une unité spéciale est médiatisée depuis 2000... comme la série anglaise.
Pour découvrir ces séries originales plutôt intéressantes, il faudra donc faire soi-même quelques recherches, ou parler avec les passionnés.

Sur ce site, je vous parlerai bientôt d'une série européenne policière parfaitement maitrisée, reprise récemment aux USA mais pas encore francisée dans sa version US , une série qui m'a vraiment tenu en haleine en une dizaine d' épisodes qui finiront bien tristement la saison1.
Son nom : BROEN/BRON/ The Bridge (Danemark)


Alain Lacour / Harlem, NYC, usa







http://www.allocine.fr/series/ficheserie_gen_cserie=3863.html

bonus séries : 3 couvertures DVD divx  : CSI Miami / Les experts : saison 5, saison 6, saison 7 en français

csi miami les experts cover divx saison 6

csi miami les experts cover divx saison 7

csi miami les experts cover divx saison 5

jeudi 20 juin 2013

Snuff / Chuck Palahniuk / roman

La célèbrissime actrice de films porno Cassie a décidé de revenir "sur le devant de la scène" en battant un record de partenaires masculins lors d'un tournage de légende.
Ce qui semble ne concerner qu'un record sportif , l'entrée dans le Guiness Book ou une merveilleuse promotion pour les articles de sex'shop portant le label de la même Cassie comporte en vérité un enjeu qui déchaine les paris et les discussions en salle d'attente : Cassie ne va-t-elle pas mourir lors de cet exploit et par qui?
Les discussions entre acteurs mâles de porno, les conditions de vie dans l'antichambre du tournage sont autant de motivations qui devraient refroidir les fans de films "pour adultes" : travail d'abattage, autobronzants dégoulinants, échanges de conseils et de pilules, misérabilisme narcissique des has-been sur le retour ou romantisme des débutants absolus sont encore bien plus triviaux que ne le laissent paraitre les images "léchées" des pornos à l'américaine.
Chuck Palahniuk, notamment auteur du célébrissime "Fight Club" qui a servi au film, est "à fond" sur son sujet et nous décrit tout "de l'intérieur". On a parfois un peu de mal à reconnaître les différents intervenants qui donnet leur vision chacun à son tour mais quand on a repéré que chaque chapitre prend son nom, c'est plus facile (lol). Un roman addictif qui refroidit les ardeurs sexuelles mais donne envie de romance et de grand amour.
A déconseiller aux fleurs bleues de tout sexe.

Alain Lacour


Snuff    Ed. Sonatine

Chuck Palahniuk
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Claro
ISBN : 978-2-35-584118-7 • 
ISBN numérique : 978-2-35-584150-7 • 
Format : 14 x 20 cm • Nombre de pages : 212 •
Prix public : 16,50 euros • Mise en vente : septembre 2012 •

Le livre sur le site de l'éditeur 



mercredi 23 janvier 2013

The Baytown Outlaws. Barry Battles . Film



Pas de grande envie de traiter de romans récemment lus, en ce moment. En effet, comme on le dit dans les séries médicales US :
"Qu'est-ce qu'on a?"

  • En roman, un polar français abracadabrantesque où la plupart des personnages se révèlent être les différentes personnalités dissociées d'une seule jeune fille : indigeste et l'auteur a fait mieux depuis.
  • Un bon bouquin  de Ian Rankin, "Plaintes", bien foutu, une  enquête criminelle de bonne tenue... mais tout çà n'est pas très original même si de bonne tenue... pas assez excitant.
  • Un excellent Ruth Rendell ( La Maison Du Lys Tigré , roman)  avec son incomparable talent à faire surgir l'angoisse dans la description de "nos" travers... Pas de vraie critique sur le net mais j'ai déja dit tout le bien que je pense de cette reine du polar et je suis déjà fan...
Finalement,  le meilleur moment passé récemment, je le dois à "The Baytown Outlaws", un film sorti en salles il y a quelques semaines et qui sortira en France en DVD en avril 2013.
Une bande de jeunes acteurs portés par leurs personnages , des seconds rôles piochés chez des piliers du ciné américain, une action hyperviolente mais peu réaliste et très jouissive. 
l'histoire : point de salut pour les trois frères Oodie, orphelins qui se retrouvent à l âge adultes après avoir connu l’enchaînement des foyers d'accueil du sud américain. Une jeune maman les engage pour reprendre son fils à son mari décadent qui le séquestre. Mais ne sont-ils pas déja engagé par ailleurs?
Un pitch prétexte à des affrontements de bandes armées en tous genres, poursuites de véhicules improbables et dialogues amusants. Les mauvais garçons ont un grand cœur, les flics corrompus rendent la vraie justice et chacun arrive à survivre à des blessures multiples...

Jouissif , et aucun cauchemar quand on a bien compris la règle du jeu (PG18 aux USA). Farci de drapeaux sudistes mais bien moins hypocrite qu' "Inglorious Basterds", dans le genre sanglant.


  • En séance au cinéma 
  • Public adulte
  • en DVD import
  • en location, prêt, achat DVD à partir du 3 avril 2013



références :


samedi 17 novembre 2012

Les Morsures Du Passé / Lisa Gardner / Roman /2012


« J 'AI SOIF, dit-il.
- Qu'est-ce qui te ferait plaisir ? proposé-je.
- Tu m'apportes à boire, connasse, ou je te casse la gueule. »
Il n'a pas l'air en colère. C'est souvent comme ça. Parfois, l'orage se déclenche d'un seul coup. Une seconde, il regarde la télé et, la seconde d'après, il démolit le salon. D'autres fois, il oscille au bord du précipice. Pourvu qu'on ait le bon mot ou le bon geste, la crise sera désamorcée. Mais dans le cas contraire...
Je me lève du canapé. C'est jeudi soir, on est en août à Boston, et il règne une chaleur et une moiteur infernales. Le genre de soirée qu'il serait plus agréable de passer sur la plage ou au bord d'une immense piscine. Naturellement, ni l'un ni l'autre n'est envisageable pour nous. Nous avons passé l'après-midi enfermés à regarder la chaîne Histoire en nous prélassant dans l'air climatisé. J'espérais qu'une soirée au calme le détendrait. Maintenant, je ne sais plus.
Dans la cuisine, j'examine les options qui s'offrent à moi. Une commande de boisson est un terrain fortement miné : d'abord, deviner la boisson attendue ; ensuite, choisir le verre/mug/gobelet qui conviendra. Sans oublier : glaçon ou pas glaçon, paille ou pas paille, serviette de cocktail ou dessous-de-verre.
Autrefois, je n'aurais pas répondu à une demande aussi agressive. J'aurais exigé une phrase aimable, un ton aimable. Je ne suis pas ta bonne, lui aurais-je rappelé. Tu me dois le respect.
Mais les choses changent. Pas d'un seul coup. Petit à petit, un moment après l'autre, un choix après l'autre. Il y a des morceaux de soi qu'on ne peut plus jamais retrouver une fois qu'on y a renoncé.
J'opte pour le mug bleu, son préféré ces temps-ci, et de l'eau du robinet : ça fera moins de dégâts quand, inévitablement, il me jettera le contenu au visage. J'en ai déjà les mains qui tremblent. Je prends plusieurs inspirations pour me détendre. Il n'a pas encore basculé. Rappelle-toi qu'il n'a pas basculé. Pas encore.
J'emporte le mug dans le salon et je le pose sur la table basse en verre tout en observant, les paupières mi-closes. Si ses pieds restent bien à plat au sol, je continue à chercher l'apaisement. S'il est déjà agité de mouvements convulsifs, s'il tape du pied par exemple ou s'il roule de l'épaule, de cette manière qui annonce souvent un brusque et puissant coup de poing, je déguerpis. Aller jusqu'au bout du couloir, attraper le lorazépam et le shooter.
Croyez-moi : il y a des morceaux de soi qu'on ne peut plus jamais retrouver une fois qu'on y a renoncé.
Il prend le mug, les pieds immobiles, les épaules relâchées. Il boit une petite gorgée pour goûter, se fige... Repose le mug.
Je recommence tout juste à respirer lorsqu'il attrape le mug en plastique et m'en assène un violent coup sur la tempe.
Je vacille, non pas tant sous la force du coup que de la surprise.
« C'est quoi, cette merde ? » hurle-t-il, à deux doigts de mon visage dégoulinant.
« C'est quoi, cette merde ?
- De l'eau », réponds-je bêtement.
Il essaie à nouveau de m'assommer, arrosant encore le canapé, puis la course-poursuite s'engage : je me rue vers l'armoire à pharmacie des toilettes du bas, tandis que lui cherche à tout prix à me plaquer au sol pour me frapper la tête contre le parquet ou me prendre à la gorge.
Il m'attrape par la cheville sur le seuil du salon. Je tombe lourdement sur le genou droit. Par réflexe, je donne un coup de pied en arrière. Je l'entends rugir de frustration lorsque je me dégage et avance encore de quatre foulées.
Il m'attrape par la taille et m'envoie valser contre le lambris. La cimaise me rentre dans les côtes et me meurtrit.
« SALOPE ! Salope, salope, salope.
- Je t'en prie », murmuré -je. Sans raison valable. Peut-être parce qu'il faut bien dire quelque chose. «Je t'en prie, je t'en prie, je t'en prie. »
Il m'attrape par le poignet et serre si fort que je sens les petits os grincer les uns contre les autres.
« Je t'en prie, chéri, murmuré je à nouveau, d'une voix que j'essaie désespérément de rendre apaisante. Je t'en prie, lâche-moi, chéri. Tu me fais mal. »
Mais il ne lâche pas. J'ai mal interprété son attitude, je n'ai pas su lire les signes et maintenant il est passé du côté obscur. Rien de ce que je peux dire ou faire n'a d'importance. C'est un fauve, il lui faut une victime.
Et je me dis, comme souvent dans ces moments-là, que je l'aime encore. Je l'aime tellement que cela me brise le cœur, plus que les os, et que je dois, même à cet instant, faire attention. Je ne veux pas lui faire de mal.
Dans la seconde qui suit, je lui envoie un coup de pied qui l'atteint derrière le genou. Il s'effondre et je lui arrache ma main. Je me précipite vers les toilettes, j'ouvre à toute volée l'armoire à pharmacie et cherche fébrilement le flacon orange.
«Je te tuerai ! rugit-il dans le couloir. Je te donnerai un million de coups de couteau. Je t'arracherai la tête. Je te boufferai le coeur, je te saignerai. Je te tuerai, je te tuerai, je te tuerai. »
Ensuite, ce bruit que je n'ai pas envie d'entendre : le claquement de ses pieds nus dans le couloir lorsqu'il fait demi-tour et court vers la cuisine.
Lorazepam… Dans ma hâte, je heurte le flacon, qui tombe par terre et roule sur le carrelage.
J'entends un autre cri, un cri de fureur sans mélange, et je sais qu'il vient de découvrir que j'ai mis les couteaux de cuisine sous clé. J'ai fait ça il y a deux semaines, en pleine nuit, pendant qu'il dormait. Il faut garder un coup d'avance. Obligé.
Le lorazépam a roulé derrière la cuvette. Mes doigts tremblent trop. Je ne peux ni l'attraper, ni le faire rouler. Du vacarme maintenant. Les portes des placards rouge cerise brutalement ouvertes, les tasses, les assiettes, les plats jetés sur le carrelage importé d'Italie. Il y a des années que j'ai tout remplacé par de la mélamine et du plastique, et ça le rend encore plus fou de rage. Il faut qu'il mette la cuisine sens dessous dessus, c'est systématique, même si l'impossibilité de casser ne fait qu'accroître sa fureur.
Encore un grand fracas, puis le silence. Je me surprends à retenir mon souffle, puis je me penche sur les toilettes en cherchant ce fichu flacon à tâtons. Le silence qui se prolonge m'inquiète encore plus que le saccage.
Que fait-il ? Qu'a-t-il découvert ? Qu'est-ce qui m'a échappé?
Bon sang, il me faut ce lorazépam, vite.
Je m'oblige à respirer pour calmer mes nerfs à vif. Une serviette, voilà la solution. La tire-bouchonner, la glisser derrière la cuvette, pousser le flacon de l'autre côté. Bien joué.
Les comprimés de tranquillisant bien en main, je me
faufile dans le couloir de ma maison désormais silen
cieuse, déjà terrifiée par ce que je pourrais découvrir. Un pas. Deux, trois, quatre...
Je suis presque au bout du couloir. Un séjour spacieux à gauche, suivi de la salle à manger qui communique avec la cuisine suréquipée à droite, le tout se terminant par l'entrée voûtée. Je jette un œil derrière le ficus moribond dans le coin, puis  j'entre à pas de loup dans le séjour, en surveillant les endroits où il pourrait être embusqué derrière le canapé d'angle, à côté du vieux meuble télé ou derrière les rideaux de soie en loques. Lorazépam. Putain, où il est, le lorazépam ?
Qu'est-ce qui m'a échappé ? À quoi n'ai-je pas pensé et que va-t-il m'en coûter ?
D'autres images se bousculent dans ma tête.
Le jour où il a surgi du garde-manger armé d'un attendrisseur à viande en bois et où il m'a fêlé deux côtes avant que je parvienne à m'enfuir.
Ou la première fois où il a pris un couperet et visé mon bras, mais où il s'est également ouvert la cuisse dans son accès de rage. J'ai eu peur qu'il se soit sectionné une artère et qu'il se vide de son sang si je m'enfuyais, alors j'ai tenu bon et je lui ai repris le couteau de haute lutte. Ensuite je l'ai consolé pendant qu'il sanglotait de douleur, et le sang de nos deux plaies a imbibé le tapis persan de notre belle entrée voûtée.
Pas le moment de penser à ces choses-là. Rester concentrée. Le trouver. Le calmer. Le droguer.
Je traverse le séjour sur la pointe des pieds et je me dirige vers la salle à manger ; je scrute tous les coins sombres, je guette d'éventuels bruits dans mon dos. La cuisine donne également sur l'entrée. Il lui serait donc facile de faire le tour pour m'attaquer par derrière.
Un pied devant l'autre. Pas à pas, en tenant le flacon de médicaments comme une bombe de gaz lacrymogène.
Je le retrouve dans la cuisine. Le jean baissé, il est en train de déféquer sur le tapis. A mon arrivée, il lève les yeux et une expression de triomphe mauvais passe sur son visage.
« Qu'est-ce que tu dis de ton précieux tapis maintenant ? Ricane-t-il. Il n'est plus aussi intéressant, hein ? »
Je m'approche de lui sans trembler et je lui tends le flacon de lorazépam. « Je t'en prie, chéri. Tu sais que je t'aime. Je t'en prie. »
En guise de réponse, il ramasse des excréments et s'en barbouille le ventre.
 «Je te tuerai », dit-il, plus calmement, comme une chose anodine.
Je ne dis pas un mot, je me contente de lui tendre le flacon de comprimés.
«Je ferai ça en pleine nuit. Mais je te réveillerai, d'abord. Je veux que tu saches. » .
Je lui tends les comprimés.
« Tu as enfermé les couteaux, me nargue-t-il, tu as enfermé les couteaux. Mais est-ce que tu as enfermé tous les couteaux ? Hein, hein, hein ? »
Il sourit, avec jubilation, et mon regard se tourne instinctivement vers l'égouttoir, dont le contenu gît désormais éparpillé sur le sol de la cuisine. Est-ce qu'il y avait un couteau dans cet égouttoir ? Est-ce que j'en ai lavé un ce matin ? Je ne m'en souviens plus et ça va me coûter cher. Il y a toujours quelque chose qui va me coûter cher.
Je tourne le bouchon du flacon. « C'est l'heure de te reposer, mon cœur. Tu sais que tu te sentiras mieux quand tu te seras reposé un peu. »
Je renverse quelques comprimés dans ma main et je m'approche ; je sens la chaleur et la puanteur de son corps à plein nez. Lentement, je lui ouvre la bouche d'un doigt et pousse le premier comprimé à dissolution rapide contre sa joue.
De son côté, il pose sa main souillée sur ma gorge et, presque avec tendresse, me caresse le creux du cou.
«Je te tuerai rapidement, me promet-il. Avec un couteau. J'enfoncerai la lame. Juste ici. »
Il frôle du pouce mon pouls affolé, comme s'il répétait le coup mortel dans sa tête.
Ensuite je vois les muscles de son visage se décrisper à mesure que le médicament agit. Sa main retombe et il sourit de nouveau. Avec douceur, cette fois-ci. Un rayon de soleil en plein orage, et j'ai envie de pleurer, mais je ne le fais pas. Oh que non.
Il y a des morceaux de soi, tellement de morceaux de soi, qu'on ne peut plus jamais retrouver une fois qu'on y a renoncé. 
Dix minutes plus tard, je le mets au lit. Je lui retire ce qui reste de ses vêtements. Je lui passe un gant de toilette savonneux sur le corps, même si je sais d'expérience que sa peau va garder un moment l'odeur des excréments. Plus tard, il m'interrogera là-dessus et je lui mentirai, parce que c'est ce que j'ai appris à faire.
Je le lave. Je me lave. La vaisselle passera au lave-vaisselle et sera rangée dans les placards. Le tapis sera sorti sur le trottoir le jour des poubelles. Mais tout ça peut attendre.
Pour l'instant, dans le silence qui suit la tempête, je retourne dans sa chambre. Sous la lumière de la lampe, j'admire ses traits paisibles et immobiles. La boucle de cheveux qui forme un épi doré juste au-dessus de sa tempe gauche, la petite moue que dessinent toujours ses lèvres dans son sommeil, comme un bébé. Je caresse la douceur de sa joue. Je prends sa main, détendue à présent, qui ne fait pas mal, qui ne détruit pas, et je la garde dans la mienne.
Et je me demande si c'est cette nuit qu'il va finalement me tuer.
Je vous présente Evan, mon fils. Il a huit ans.


Livre papier : 20euros.   Disponible en Bibliothèques de prêt

Auteur Lisa Gardner
Traduction Cécile Deniard
Editeur Albin Michel
Date de parution 29/08/2012
Collection Special Suspense
ISBN 2226243046
EAN 978-2226243041



mardi 3 juillet 2012

L'Heure Des Gentlemen - Don WINSLOW - Roman

On ne peut pas dire que le Polar Californien est un genre en lui-même tellement les variantes en sont nombreuses. Entre les mondes de James Ellroy et ceux de Joseph Hansen, peu de points communs. Don Winslow s'intéresse à la SC (South California), à SD (San Diego appelée amicalement San Dog) et aux surfers du XXIème siècle.
Evidemment, pas de quoi faire une série si ces surfeurs ne sortent pas de l'océan mais chacun d'eux a un "petit boulot", qui dans la police, qui dans une boutique de location de planches, qui en maître nageur tombeur,etc... Afin d'éviter le syndrome Miss Marpple, la retraitée paisible qui attire les meurtres de façon irréaliste, le héros de Don Winslow , qui s'appelle Boone Daniels est DP (détective privé, je précise pour les âmes perverties) en plus d'être surfer, beau garçon, coeur d'artichaud, timide et baraqué...
Notre ami Boone est aussi un peu morose : la seule fille du clan des surfers de La Patrouille de L'Aube qui réunit les jeunes dans l'eau chaque jour, la seule fille, donc, vient de passer professionnelle de la planche et fait une tournée  sponsorisée loin du pauvre DP. De plus, il ne sait pas trop dans quelle "position" ils étaient au moment de la séparation : amis? amants? presque fiancés?
Pire, le mois d'Août s'étire sur PB (Pacific Beach) et pas l'ombre d'un roll, d'une vague voire d'une vaguelette n'est visible, attendue, même imaginée et se retrouver chaque matin une heure dans l'eau pendant "La Patrouille de l'Aube", avant le boulot, ne permet que de papoter allongé sur son board ou gérer sa gueule de bois de la veille en se soulageant directement dans l'océan sans effort.
Si cette joyeuse bande avait 16 ans de moyenne d'âge, cela serait amusant mais nos compères semblent avoir dépassé la trentaine et d'autres cas de conscience étreignent notre personnage récurrent : n'est-il pas en train de devenir un homme, ne fait-il pas partie des vieux désormais et ne devrait-il pas quitter la "Patrouille de L'Aube" pour intégrer 'L'heure Des Gentlemen" qui lui succède et réunit les vieux briscards du surf qui, pour certains, ne prennent même pas la peine de mettre le pieds dans l'eau.
L'auteur a créé pour son héros tout un monde qui gravite autour du surf californien, en déroulant l'histoire légendaire et ses aboutissants actuels, dans une Californie Du Sud où l'immobilier est la dernière ruée vers l'or, où les petits garçons ont du mal à grandir, où les trentenaires croient avoir perdu toute séduction...
Notre détective ne va-t-il pas perdre ses amis en travaillant pour l'avocat qui défend l'assassin présumé du dieu local de la zénitude surfeuse?
Les gens cool ne sont-ils pas aussi bouchés et intolérants que les beaufs qu'ils fuient?
Y a-t-il une vie après l'âge de 20 ans?
Faut-il embrasser le premier soir?
Peut-on réussir à inventer un responsable à poursuivre en justice (eh, c'est l'Amérique!) quand on a construit sur des sables mouvants des demeures royales pour des dealers et qu'elles ont disparu dans un trou après un mini tremblement de terre arrosé d'une averse?
Je m'aperçois en tapant ces quelques lignes que ce bouquin est étrangement sérieux dans son ton. L'humour y est rare, les pages entièrement documentaires y sont nombreuses : c'est un cours sur la pratique du surf, l'investissement immobilier, la difficulté des relations hommes-femmes quand la femme est avocate et l'homme surfeur, la chronologie des différentes drogues qui se sont succédées dans le corps des californiens, la fin de l'ouverture d'esprit légendaire des surfeurs (lol) qui vire maintenant à l'esprit de clocher xénophobe : ma plage, mon break, mon pick-up, ma vague...
Oui, il y a une intrigue à la Perry Mason, plutôt bien faite d'ailleurs, qui amènera dans l'esprit de notre héros la pire des interrogations : maintenant que j'ai plus de trente ans, que mes amis surfeurs me détestent, que je suis amoureux d'une working girl fashionnista avocate bien payée, pourquoi ne pas aller jusqu'au bout de l’infamie et préparer les concours du barreau?
Ah, l'adolescence mentale où tout est posiible...

Mon avis : une nouveauté sympathique.

L'Heure des Gentlemen
Don Winslow 2009/2012
Editions du Masque  22€50
En bibliothèque de prêt également.

lundi 26 mars 2012

Moonlight Mile / Dennis LEHANE / roman

"L'air était inhabituellement doux en ce bel après-midi de début décembre quand Brandon Trescott est sorti du spa du Chatham Bars Inn, à Cape Cod, pour monter dans un taxi. Une fâcheuse succession d'arrestations pour conduite en état d'ivresse lui ayant coûté le droit de prendre le volant dans l'État du Massachusetts pen­dant encore trente-trois mois, il se déplaçait toujours en taxi. À vingt-cinq ans, pourvu d'une solide rente depuis sa naissance, ce rejeton d'une magistrate de la Cour suprême et d'un magnat des médias locaux ne se conten­tait pas d'être un banal petit con de gosse de riches ; il battait tous les records dans sa catégorie. Lorsque les autorités lui avaient finalement retiré son permis, il en était à sa quatrième infraction pour conduite en état d'ivresse. Les deux premières s'étaient soldées par une amende pour excès de vitesse, la troisième lui avait valu un sévère rappel à l'ordre, mais la quatrième avait donné lieu à une action en justice car elle avait occasionné des blessures sur une personne autre que le conducteur, qui s'en était tiré sans une égratignure.
En cette journée hivernale où le thermomètre indi­quait un peu moins de cinq degrés, Brandon portait un sweat-shirt à capuche griffé, avec effet taché et délavé, valant bien neuf cents dollars, sur un T-shirt blanc en soie au col déformé par une paire de lunettes noires qui devait aller chercher dans les six cents. Quant à son bermuda, il s'ornait de fines déchirures - la touche finale obligeamment apportée par un gamin indonésien payé une misère pour sa peine. Chaussé de tongs malgré la température, Brandon arborait avec nonchalance une belle tignasse blonde de surfeur dont quelques mèches rebelles s'obstinaient à lui retomber devant les yeux pour un effet des plus charmants.
Un soir, après avoir bu comme un trou au Crown Royal, il avait retourné sa Dodge Viper en revenant de Foxwoods avec sa petite amie. Celle-ci ne l'était que depuis deux semaines, et il y avait peu de chances pour qu'elle puisse redevenir un jour la petite amie de quel­qu'un : la jeune Ashten Mayles se trouvait dans un état végétatif permanent depuis que le toit de la voiture lui avait broyé le sommet du crâne. L'une des dernières choses qu'elle avait tenté de faire quand elle avait encore l'usage de ses bras et de ses jambes, c'était de prendre ses clés à Brandon sur le parking du casino. D'après les témoins, il avait répondu à ses inquiétudes en expédiant vers elle sa cigarette allumée.
Sans doute pour la première fois de sa vie, Brandon Trescott avait eu un aperçu des conséquences de ses actes quand les parents d'Ashten, qui ne roulaient pas sur l'or mais comptaient pas mal de relations politiques, avaient décidé de tout mettre en œuvre pour s'assurer que le responsable paye le prix de ses erreurs. D'où les poursuites intentées par le procureur du Suffolk pour conduite en état d'ivresse et mise en danger de la vie d'autrui. À aucun moment pendant le procès, Brandon ne s'était départi de son air scandalisé, comme s'il ne concevait pas qu'on puisse le tenir pour personnellement responsable de quoi que ce soit. Pour finir, il avait été reconnu coupable et condamné à quatre mois d'assigna­tion à résidence. Dans une résidence vraiment chouette.
Au cours du procès civil qui avait suivi, il était apparu que le rejeton rentier se trouvait fort dépourvu. Il n'avait pas de rente, pas de voiture non plus, ni de maison. Pour autant qu'on puisse en juger, il n'avait même pas un iPod. Rien n'était à son nom. Oh, il y avait eu des choses à son nom, mais comme par hasard il les avait cédées à ses parents vingt-quatre heures avant l'acci­dent. C'était ce « avant » qui révoltait tout le monde, sauf qu'il n'y avait pas moyen d'apporter la preuve du contraire. Quand le jury du tribunal civil avait accordé aux Mayles sept millions et demi de dollars de dommages et intérêts, Brandon Trescott s'était borné à retourner ses poches vides en haussant les épaules.
J'avais une liste de toutes ces choses que Brandon possédait autrefois et dont il n'avait plus le droit de se servir. L'usage des choses en question, avait précisé le tribunal, ne relèverait pas seulement de l'apparence de la propriété mais de la propriété de fait. Lorsque les Trescott avaient tenté de contester la définition même de « propriété » donnée par la cour, les journalistes leur étaient tombés dessus à bras raccourcis, et le tollé général avait retenti avec une force capable de ramener vers la côte les bateaux égarés en pleine nuit dans le brouillard ; sous la pression, ils avaient fini par accepter les termes du marché.
Le lendemain, comme en un magistral bras d'honneur adressé à la fois aux Mayles et aux voix sonores de la populace, Layton et Susan Trescott avaient offert à leur fils un appartement à Harwich Port, les avocats des Mayles n'ayant pas mentionné dans l'accord les gains à venir ou les futures possessions. Et c'est justement en direction d'Harwich Port que je suivais Brandon en ce début d'après-midi du mois de décembre.
Son appartement puait le moisi, la moquette impré­gnée de bière et les restes de nourriture abandonnés dans l'évier sur des assiettes encroûtées. Je le savais pour y être entré à deux reprises afin de poser des mouchards, de récupérer les mots de passe sur son ordinateur, et plus généralement de faire tout le boulot du parfait fouille-merde que les clients sont prêts à payer une for­tune du moment qu'ils peuvent prétendre ne rien savoir de ses activités. J'avais consulté les rares documents que j'avais pu trouver, mais sans découvrir la moindre trace de comptes bancaires dont nous aurions ignoré l'existence ou de relevés de situation qui n'auraient pas été communiqués. L'exploration minutieuse de ses fichiers informatiques ne m'en avait guère révélé plus : rien que de grandes tirades auto complaisantes adressées à ses ex-copains d'université et quelques brouillons de lettres pathétiques, bourrées de fautes, en attente d'être envoyées à diverses rédactions. Il se rendait sur des tas de sites porno ou de jeux en ligne et lisait tous les articles écrits sur lui.
Quand le taxi l'a déposé devant l'immeuble, j'ai sorti de la boîte à gants mon magnétophone numérique. Le jour où je m'étais introduit chez Brandon pour pirater son ordinateur, j'avais également placé un premier émetteur radio pas plus gros qu'un grain de sel sous sa console de jeu et un second dans sa chambre. Je l'ai entendu pousser toute une série de petits grognements tandis qu'il se préparait à prendre une douche, puis je l'ai écouté passer sous le jet, s'essuyer, se rhabiller, se servir un verre, allumer son téléviseur à écran plat, s'ar­rêter sur une émission de téléréalité débile réunissant des décérébrés et s'installer sur le canapé pour se gratter à son aise.
Je me suis donné deux bonnes claques sur les joues afin de me réveiller avant de feuilleter le journal que j'avais abandonné sur le siège passager. On prévoyait une nouvelle hausse du chômage. Un chien avait réussi à sauver ses maîtres d'un incendie à Randolph alors que, tout juste opéré de la hanche, il avait les pattes arrière immobilisées dans une sorte de fauteuil roulant pour toutous éclopés. Le boss de la mafia russe locale était poursuivi pour conduite en état d'ivresse après avoir échoué sa Porsche sur la plage de Tinean à marée haute. Les Bruins avaient remporté une victoire dans un sport qui me rendait somnolent quand je le regardais à la télé, et un troisième base de la Major League au cou de taureau avait réagi avec la plus vive indignation quand on l'avait interrogé sur son éventuelle utilisation de stéroïdes.
La sonnerie du mobile de Brandon m'a interrompu dans ma lecture. Il s'est entretenu avec un gars qu'il n'arrêtait pas d'appeler « mon pelo », sauf qu'il pronon­çait « peleuh ». Ils ont parlé de World of Warcraft et de Fallout 4 sur PS2, des rappeurs Lil Wayne et T.I., et aussi d'une nana qu'ils connaissaient du club de gym et dont la page Facebook mentionnait toutes les séances d'exercice qu'elle s'imposait sur sa Wii alors qu'elle habitait - « sérieux, je te jure » - en face d'un parc, et j'ai regardé par la vitre avec l'impression d'avoir vieilli. 
Ce sentiment-là me venait de plus en plus souvent, depuis quelque temps, sans pour autant me plonger dans la tristesse. Si c'est tout ce que les jeunes d'aujourd'hui savaient faire de leurs vingt ans, je les leur laissais volontiers. Leurs trente ans aussi, d'ailleurs. J'ai incliné mon siège vers l'arrière et fermé les yeux. Au bout d'un moment, Brandon et son « peleuh » ont pris congé :
- Bon, ben, gaffe à toi, mon peleuh.
-- Pareil pour toi, mec. Pareil.
- Hé, peleuh...
- Quoi ?
- Non, rien. J'ai oublié. Fais chier. 
- Quoi ?
- D'oublier des trucs.
- Sûr.
- Allez, à plus.
- Ouais, à plus.
Sur ce, ils ont raccroché.
J'ai cherché des raisons de ne pas me tirer une balle dans le crâne. J'en ai rapidement trouvé deux ou trois dizaines ; pour autant, je n'étais pas certain de pouvoir endurer de nouvelles conversations entre Brandon et un de ses « peleuhs ».
Pour Dominique, c'était une tout autre histoire. Domi­nique était une prostituée haut de gamme entrée dans la vie de Brandon dix jours plus tôt par l'intermédiaire de Facebook. Ce premier soir, ils avaient tchaté pendant deux heures. Depuis, ils s'étaient parlé trois fois sur Skype. Dominique avait gardé tous ses vêtements mais s'était lancée dans des descriptions débridées de ce qui arriverait si a) elle daignait coucher avec lui et b) il réussissait à se procurer la confortable liasse de billets nécessaire à la concrétisation d'une telle éventualité. L'avant-veille, ils avaient échangé leurs numéros de portable. Et ce jour-là, Dieu soit loué, elle lui a passé un coup de fil trente secondes à peine après le « peleuh ». Exemple de la manière dont cet abruti répondait au téléphone :
Brandon : Ouais, quoi ?  (Véridique. Et il y avait encore des gens pour l'appeler ... )
Dominique : Salut.
Brandon : Hé, salut ! Merde. Hé ! T'es dans le coin ? Dominique : J'y serai bientôt.
Brandon : Super, t'as qu'à faire un saut ici, alors.
Dominique ; T'as déjà oublié notre petite conversa­tion sur Skype ? Je ne coucherais pas avec toi dans cette décharge même en combinaison de protection.
Brandon : Alors ça y est, tu t'es enfin décidée à cou­cher avec moi ? Merde, j'avais encore jamais rencontré de pute qui choisissait ses clients.
Dominique : T'en avais déjà rencontré une qui avait ma classe ?
Brandon : Ça non. Sans compter que t'as, quoi, presque l'âge de ma mère. Pourtant, merde, t'es la meuf la plus canon que...
Dominique : T'es chou. Mais que les choses soient claires : je ne suis pas une pute, je suis une prestataire de services charnels.
Brandon : Waouh ! Je sais même pas dans quelle langue tu me parles.
Dominique : Tu m'en diras tant. Bon, file vendre une SICAV, encaisser un chèque ou je ne sais quoi, et rejoins-moi.
Brandon : Quand ?
Dominique : Maintenant.
Brandon : Là, tout de suite ?
Dominique : C'est ça, tout de suite. Je suis en ville juste pour l'après-midi. Il n'est pas question que j'aille
à l'hôtel, alors t'as intérêt à trouver une autre solution, et vite, parce que je n'attendrai pas longtemps. Brandon : Même pas dans un hôtel superchic ? Dominique : Je vais raccrocher. Brandon : Non, tu...
Elle a coupé la communication.
Brandon a pesté. Expédié sa télécommande contre le mur. Balancé un coup de pied dans un truc.
- Qu'est-ce que tu crois, que c'est la première et dernière pute surtarifée que tu croiseras dans ta vie ?
Tu sais quoi, mon peleuh ? Des comme elle, tu peux t'en payer treize à la douzaine. Avec de la poudre en prime. Suffit d'aller à Vegas.
Oui, il se donnait à lui-même du « peleuh ».
Son téléphone a de nouveau sonné. Il avait dû l'en­voyer valdinguer quelque part en même temps que la télécommande, car la sonnerie me paraissait assourdie, et j'ai distingué des bruits dans la pièce me laissant supposer que Brandon retournait tout pour le retrouver. Quand il a enfin mis la main dessus, le combiné s'était tu.
- Fais chier !
Il avait crié tellement fort que si ma vitre avait été ouverte, je l'aurais sans doute entendu de la voiture.
Il s'est écoulé encore trente secondes avant qu'il se mette à prier.
- Écoute, mon peleuh, c'est vrai, j'ai déconné grave, mais si elle rappelle, je te promets que j'irai à l'église fourrer tout un tas de billets verts dans un de ces petits paniers. Et que je serai sage comme une image. Allez, peleuh, fais qu'elle rappelle.
Oui, il avait aussi donné du « peleuh » à Dieu. Deux fois.
Le combiné avait à peine éructé une première son­nerie que Brandon soulevait le clapet. 
- Ouais ?
- C'est ta seule chance.
- Je sais.
- Indique-moi une adresse. 
- Merde. Je...
- OK, je raccro...
- 773 Marlborough Street, entre Dartmouth Street et Exeter Street.
- Quel bâtiment?
- T'inquiète, tout est à moi.
- J'y serai dans quatre-vingt-dix minutes.
- Attends ! s'est-il exclamé. Comment veux-tu que je fasse pour avoir un taxi tout de suite ? En plus, ce
sera bientôt l'heure de pointe.
- Alors vole, mon chou, vole ! Rendez-vous dans quatre-vingt-dix minutes, pas une de plus. Sinon, adieu.
La voiture était une Aston Martin DB9 de 2009, un joujou qui valait bien deux cent mille dollars. Quand Brandon l'a sortie du garage deux maisons plus loin, je l'ai cochée sur la liste posée à côté de moi. Lui, je l'ai photographié cinq fois au volant tandis qu'il attendait une occasion de s'insérer dans le flot de la circulation.
Lorsqu'il a démarré en trombe comme s'il voulait se propulser vers la Voie lactée, je n'ai même pas essayé de le prendre en chasse. À la façon dont il louvoyait d'une file à l'autre, même un empoté de première tel que lui n'aurait pas tardé à se rendre compte que je lui collais au train. Sans compter que je n'avais pas besoin de le suivre : non seulement je savais où il allait, mais je connaissais un raccourci.
Il est arrivé à destination quatre-vingt-neuf minutes exactement après le coup de téléphone de Dominique. Il s'est rué dans l'escalier, et j'ai encore pris quelques clichés au moment où il déverrouillait la porte. Il a ensuite grimpé quatre à quatre les marches à l'intérieur sans remarquer que je lui avais emboîté le pas. Je me tenais à environ cinq mètres de lui, mais il était telle­ment survolté qu'il lui a fallu deux bonnes minutes pour s'apercevoir de ma présence. Dans la cuisine, au pre­mier, il a commencé par ouvrir le frigo avant de se retourner en entendant le déclencheur de mon SLR, puis de s'adosser à la haute fenêtre derrière lui.
- T'es qui, toi, putain ?
- Bah, c'est pas le problème.
- T'es un paparazzi ?
- Qu'est-ce que les paparazzi en auraient à cirer d'un branleur comme toi ?
Je l'ai de nouveau mitraillé.
Il a légèrement reculé pour mieux me jauger. Ayant déjà surmonté la peur suscitée par l'irruption d'un inconnu dans sa cuisine, il abordait l'étape suivante : l'évaluation du risque.
- T'es pas tellement costaud... (Il a redressé sa tête de surfeur.) Je pourrais te foutre dehors sans problème.
- Je ne suis pas costaud, c'est vrai, mais je te garantis que tu ne me foutras pas dehors. (J'ai baissé mon appa­reil.) T'as des doutes ? Alors regarde-moi bien dans les yeux.
Il s'est exécuté.
- Tu vois ce que je veux dire ?
En guise de réponse, il s'est fendu d'un hochement de tête à peine perceptible.
J'ai passé sur mon épaule la lanière de mon appareil
avant d'adresser à Brandon un petit signe de la main. - J'allais partir, de toute façon. Alors bonne journée,
et tâche de ne plus bousiller le cerveau de personne.
- Qu'est-ce que tu vas faire de ces photos ?
Les mots m'ont brisé le coeur en même temps que je les énonçais :
- En gros, rien.
Brandon a paru tomber des nues, ce qui semblait assez courant chez lui.
- Tu bosses pour les Mayles, c'est ça ?
J'ai achevé de réduire mon cœur en charpie.
- Non. (J'ai soupiré.) Pour Duhamel & Standiford. 
- C'est quoi, un cabinet d'avocats ? J'ai esquissé un geste de dénégation.
- Une agence de sécurité, spécialisée dans les recherches et investigations.
La bouche ouverte, les yeux plissés, il me dévisageait toujours.
- Ce sont tes parents qui nous ont engagés, crétin. Ils étaient persuadés que tu finirais par faire une connerie parce que, eh bien, t'es qu'un con, Brandon. Ta petite démonstration d'aujourd'hui devrait confirmer leurs craintes.
- Hé, je suis pas un con ! La preuve, je suis allé à Boston College.
J'aurais pu lui balancer une bonne dizaine de vannes, au lieu de quoi j'ai senti un frisson de lassitude me parcourir tout entier.
C'était ça, ma vie, aujourd'hui. Mon lot quotidien. J'ai quitté la cuisine.
- Bonne chance, Brandon. (Parvenu à mi-hauteur de l'escalier, je me suis arrêté.) Au fait, Dominique ne viendra pas.
Je me suis retourné et, le coude appuyé sur la rampe, j'ai ajouté :
- Et Dominique, ce n'est pas son vrai nom.
Ses tongs ont claqué sur le plancher avec un petit
bruit de baiser mouillé quand il s'est avancé jusqu'à l'encadrement de la porte au-dessus de moi.
- Qu'est-ce que t'en sais, d'abord ?
- Elle bosse pour moi, tête de noeud."





Tout ceci n'est que la pré-séquence, l'introduction de "Moonlight Mile " de Dennis Lehane et on se dit que l'auteur dépeint un  enquêteur qui semble avoir réussi son coup et qui devrait en être remercié : il n'en sera rien ... 
Dennis Lehane (Shutter Island, Mystic River...) fait ici appel au personnage de très jeune enquêteur de "Gone, baby, gone" que l'on retrouve 12 ans plus tard.  Or, bien que ses enquêtes soient couronnées de succès,  il a de plus en plus de mal à comprendre le monde dans lequel il vit et à voir reconnus ses résultats professionnels car les formes comptent davantage que les capacités dans la société américaine de 2011. 

On se rappelle que, dans "Gone, baby, gone", il avait retrouvé la jeune disparue même s' il s'était avéré que les méchants n'étaient pas ceux que l'on croyait et qu'un kidnapping n'est pas toujours réalisé pour de mauvaises raisons.
Aujourd'hui, il ne faut pas seulement être efficace et professionnel mais aussi adopter un ton obséquieux et déférent en tendant la main au moment d'être rétribué, ne pas dire de gros mot en arrêtant un assassin, sourire en face de l'injure, encaisser sans tiquer les mensonges éhontés proférés par les puissants et travailler dur dans l'attente d'une offre de partenariat sans cesse repoussée à demain par le patron.

Alors, quand cette affaire vieille de douze ans connaitra un tardif rebondissement et leur sera de nouveau proposée, Patrick et Angie n'auront d'autre choix que de repartir à zéro sur cette histoire qui promet si peu.
Il en est de même du roman qui n'est pas une démonstration de maitrise comme a pu l'être "Shutter Island" mais plutôt un moyen pour l'auteur de nous narrer une assez bonne histoire en l'enrichissant largement de points de vue sur l'Amérique libérale d'aujourd'hui et donc de notre futur proche européen, des évidences que chacun semble découvrir quand il est trop tard, des lois qui excluent les sentiments... Un moyen également de (re)découvrir une belle relation de couple  avec les deux personnages qui ont aujourd'hui charge de famille.
Un joli retournement en fin de roman, mais plutôt classique, avouons-le.

Moonlight Mile
2010/2011 Dennis Lehane
Rivages Thriller  - Payot
Paru  mai 2011

ISBN  : 978-2-7436-2227-5
EAN  : 9782743622275
Nb. de pages : 380 pages
20 euros

mercredi 4 janvier 2012

Philby, portrait de l'espion...Roman de Robert Littell

L'idée semble étrange de revenir sur l'histoire de Kim Philby qui défraya la chronique dans les sixties en passant à l'est alors qu'il était en passe d'être découvert par les services de contre-espionnage de l'ouest.
Alors, quel était l'intérêt de le faire revivre aujourd'hui?
Le scandale qui en a découlé?
La méfiance qui devait perdurer quant aux services secrets britanniques dont il était l'un des piliers et la tâche difficile du nettoyage de ces services (La Taupe ou L'espion qui venait du froid)?
L'histoire aujourd'hui connue de ces quatre étudiants du Cambridge des années 30 qui allaient pactiser avec le communisme ( Cambridge Spies)?
Les services américains dirigés par un James Angleton convaincu que les hommes de Moscou étaient partout?
L'apparition du traître dans les documentaires ou même représenté à la fin de sa vie dans le 4ème protocole...

Alors, que va apporter Robert Littell avec son récent "Young Philby" paru en novembre dernier (2011) en version française?
Au premier abord, l'ouvrage semble bien léger, en quantité : une suite de témoignages narratifs respectant la chronologie de la vie du "Jeune Philby", témoignages directs ou indirects de gens amenés à parler de lui et des circonstances qui les ont mis en rapport avec ce espion en devenir.

L'histoire est connue, presque classique et le lecteur cherche à recouper les informations qu'il a déjà du personnage, des différences avec la mini série de la BBC ou des héros de John Le Carré. Un jeune diplomé de la meilleure société est approché puis recruté par les services secrets soviétiques dans l'espoir qu'il fera carrière dans la politique, le journalisme ou même les services secrets. On fera appel à cet espion dormant indétectable quand il aura une situation stratégique...
Littell écrit bien, donnant une apparente vérité aux différents styles de ses témoins , adaptant sa technique de narration à chacun et il est assez facile de suivre le fil de l'histoire.
Mais la vraie force du roman est de proposer dans les derniers chapitres une version formidablement différente de celle que l'on connait bien aujourd'hui. Une version qui "s'appuierait" apparemment sur un solide témoignage même s'il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'un roman, de fiction et non de documentaire.
Alors oui, vraiment, le bouquin vaut le coup d'être lu par les connaisseurs de l'affaire Philby car, à la lumière des rapports de force entre grandes puissances aujourd'hui, l'hypothèse de Littell est plus crédible qu'elle ne l'aurait été au lendemain de la défection du maître espion. Une bonne occasion de se pencher sur la bibliographie de Robert Littell.
Mais il n'y aura jamais de certitude à ce sujet car aucune archive ne pourra jamais être perçue comme véridique...

A lire : pour les fans d'espionnage au temps de la guerre froide, pour les amateurs de bonne prose.
Les novices pourront commencer par "Cambridge Spies" en video...
A acheter : pour compléter la série liée à cet espion ou cette époque (environ 20€).
Souvent en dotation dans les bibliothèques (généralement en prêt nouveauté de courte durée)




Références :

dimanche 9 octobre 2011

Justified / Série


Les acteurs américains ont toujours eu une démarche qui campait déjà leur personnage. John Wayne arrivait d'un pas lent, s'ancrant dans le sol et on ne l'a guère fait courir plus de trois pas, même pour jouer les misérables policiers réacs dans les eighties.

Un peu plus tard, on a eu les écraseurs, qui avancent d'un bon pas, les pieds ouverts : les Richard Gere et autres Travolta même si ce dernier a souvent ajouté des nuances légères renforçant la noirceur de certains rôles. Comme Delon n'a souvent que joué le rôle d"Alain Delon" ou Gabin faisait du Gabin et étaient choisis pour celà, nombre d'acteurs américains non issus de l'Actor Studio se créaient une personnalité générale et ne la modifiaient que par touche pour chaque rôle.

Timothy Olyphant, dans "Justified" est un Marshall sudiste qui en a la lenteur légendaire mais oscille parfois comme un adolescent ( ici de 43 ans) monté en graine qui ne sait que faire de ses longues jambes qui lui seraient poussées  en une courte nuit entre les derniers sms échangés à l'aube et le réveil tardif et urgent pour les cours sadiquement programmés dès 10 h00 du matin.
Mais Raylan Givens, son rôle dans la série, est bien plus dangereux que son apparence ne le laisse supposer. Comme Lucky Luke, il a fait ses choix de morale et tire plus vite que son ombre.

Cette philosophie est-elle applicable en 2011 dans une série policière alors que les ligues de vertus chrétiennes évangélistes sont surpuissantes?

Mais oui, bien sûr!
Une série télévisée américaine où l'on prononce plus d'une fois le mot "Fuck" par épisode est désormais interdite aux moins de 12 ans mais on peut continuer à tuer à tour de bras et baiser un peu tant que le bas du corps reste caché sous les draps ; cette dernière règle ne gène pas trop les scénaristes puisque seule une position est autorisée chez les gentils, une de plus chez les dévergondé(e)s et encore une supplémentaire chez les méchants élevés au ranch puisqu'elle évoque l'espèce canine.

Raylan Givens (Timothy Olyphant) a pourtant bien des soucis. Est-ce sa faute si les méchants qu'il pousse au pied du mur finissent toujours par lui tirer dessus et se font descendre par ce qu'il est en état de légitime défense (tir justifié > "Justified", cqfd) ?
Alors qu'il a fui le Kentucky, ses péquenauds, ses alcools frelatés et autres accouplements consanguins pour la douceur suave de Miami, le pauvre se verra renvoyé au pays après avoir descendu de façon "justifiée" un tueur de la mafia sur une terrasse de restaurant bondée.
Alors, malheureux, notre héros?
Mais non , il ne lui faudra que treize épisodes de la première saison pour revendiquer son appartenance à ce Kentucky où il est né : arrosé de Bourbon, nourri de Fried Chicken, où l'on frappe trois coups sur le montant des moustiquaires avant d'entrer.

Et le méchant?
Le méchant est évidemment un ami d'enfance du flic.
Leurs pères respectifs sont presque aussi vereux l'un que l'autre, ils ont courtisé les mêmes filles et joué ensemble à je ne sais plus quel sport local dont seul les américains connaissent les règles, etc...
J'ai vu Dieu ou je fais semblant?
Erica goes to PloucVillage
Et voila-t-y pas (would'n't you know that?) que le méchant ( Walton Goggis) aurait rencontré Dieu dès le début de la série grâce à l'aide du gentil marshall qui lui a fait voir la lumière blanche au bout du tunnel avant de réchapper miraculeusement de la mort !
Goggis, après son rôle de premier ordre dans "the shield " ( et une pléthore d'interprétation en une quinzaine d'années) est formidable dans Justified, avec une palette d'émotions qu'on soupçonnait déjà. Cet acteur est impressionnant et les épisodes nous donnent l'occasion de voir son personnage évoluer, au moins en apparence. Mais les humains changent-ils vraiment?
Les deux premiers épisodes seront évidemment déclencheurs sur ce que vous penserez de l'ambiance, des thèmes, des personnages.
Moi, j'adore et, comme je n'ai trouvé de trace de diffusion française que sur une chaine "orange" (!), on essaiera la location de dvd pour s'en faire une idée entre amis et éventuellement y passer la nuit.


Timothy Oliphant (le marshall) a ses détracteurs après ses prestations dans Scream2, la série Deadwood, Dream Catcher ou the girl next door.. Aucune trace de ce mec dans mon cerveau poussif mais je l'aime bien dans Justified :
  • ce mélange de "je me fous de ta gueule" et " on frappe avant d'entrer", 
  • cette opposition entre "j'ai un gros calibre " et "je marche comme une pétasse", 
  • ce physique de grande gigue qui n'a jamais connu les appareils de muscu.
Walton Goggis est formidable (je le rappelle) dans cette série encore produite chez FX (comme "the shield) et très à l'aise loin des métropoles chères aux initiateurs de séries.

Les personnages féminins offrent également une certaine complexité avec, en acteurs récurrents :
  • la calme ex-femme du marshall, Natalie Zea
  • Joelle Carter son amie d'enfance qui va enfin "conclure" de plusieurs façons
  • Erica Tazel, une enquêtrice qui a un peu de mal dans le monde des Pierrafeu  
Les fans remarqueront que la deuxième saison est disponible également.



      samedi 6 août 2011

      Tout sur Joseph Hansen

      Décrire Joseph Hansen comme un auteur qui aurait profité de la libération homosexuelle pour se faire un nom serait lui faire injure : la plupart des gays n'ont jamais entendu parler de lui, il ne fait pas partie des gays flamboyants et amusants comme le furent Liberace ou Michou, ses publications n'ont jamais été des blockbusters et il n'a guère misé sur l'homophobie de ses jeunes années pour se décrire victime. Poête mais surtout auteur de romans noirs et polars, il a toujours publié même s'il fallut longtemps le faire sous pseudonymes.

      Son héros récurrent est l'agent d'assurances Dave Brandstetter, blanc, californien et peu intégré au ghetto gay, un personnage a qui sa fonction permettra de dénouer plusieurs intrigues tout au long d'une douzaine de romans. Le personnage se lie avec un jeune noir évoluant dans les milieux de la télé (on est encore en période pré informatique : la télé est LE domaine branché).

      Si les deux héros de Hansen sont plutôt placides et ouverts, les thèmes abordés mettent souvent en scène des personnages qui cachent leurs désirs, leurs tendances ce qui les poussent, mensonges après faux semblants, au meurtre...

      Mais JH n'est pas tendre avec les couples gays qui, lorsque la pression sociale s'est allégée dans les états les moins conservateurs, n'ont pas évité pour autant le mensonge, la convoitise et l'appat du gain. Dans " Pente Douce", il fait le portrait d'un homme qui apparait tout d'abord sous un jour positif et amical pour devenir ensuite victime de ses sentiments mais se dirigera immanquablement vers sa perte, comme tout bon roman noir doit le raconter.

      Alors que la série des romans mettant en scène l'enquêteur Brandstetter (qui semble un peu représenter l'auteur) laissent une part optimiste dans la relation amoureuse des deux partenaires, les romans plus personnels de Joseph Hansen sont noirs et sans grand optimisme sur la nature humaine.
      Né en 1923 et décédé en 2004, Joseph Hansen a laissé son témoignage des états de l'ouest américain dans leur évolution au fil de dizaines d'années aujourd'hui disparues.

      Bibliographie (source Wikipedia)
      sous le pseudonyme de James Colton
      1964 : Lost on Twilight Road
          1965 : Strange Marriage
          1968 : Homosexuel notoire (Known Homosexual) - Réédité 2 fois sous les titres "Stranger to Himself" 1977 et "Pretty Boy Dead " sous la signature de Joseph Hansen.
          1969 : Hangup ; Cocksure ; Gard
          1971 : The Outward Side ; Todd

      La saga « Dave Brandstetter
          1970 : Le Poids du monde (Fade out) - ou " Un blond évaporé (1971)"  en partie censuré ;
          1973  : Le Noyé d'Arena Blanca (Death Claims) ;
          1975  : Par qui la mort arrive (Trouble Maker) ;
          1978  : Les mouettes volent bas (The Man Everybody Was Afraid of) ;
          1979  : À fleur de peau (Skinflick) ;
          1982 : Gravedigger (Gravedigger) -  Petit papa pourri (1983)(série noire) ;
          1984 : Les Ravages de la nuit (Nightwork) ;
          1986 : Le petit chien riait (The Little Dog Laughed) ;
          1987 : Un pied dans la tombe (Early Graves) ;
          1988 : Obédience (Obedience) ;
          1990 : Le Garçon enterré ce matin (The Boy Who Was Buried This Morning) ;
          1991 : Un pays de vieux (A Country of Old Men) ;

      Sans Dave Brandstetter :

          1982 : Promesses non tenues (Backtrack) - Paru une première fois sous le titre C'est de famille (1983) ;
        1985 : Pente douce (Steps Going down) ;http://culture-et-debats.over-blog.com/article-2369314.html
          1994 : En haut des marches (Living Upstairs) ;