Comme c'est bien naturel en prenant de la bouteille, Peter May a fait
vieillir avec lui ses personnages et son narrateur est aujourd'hui un
retraité plus tellement solide. Cet homme a gardé quelques vieux amis
d'adolescence et c'est l'un d'entre eux qui est porteur de la mauvaise
nouvelle : un des anciens de la vieille bande qui a fait les quatre cent
coups dans des temps reculés vient de se faire buter. Et le
messager a
son idée sur le coupable : il suffit juste de reformer le groupe qui
avait fugué à Londres en 1965, de retourner sur place et il se fait fort
d'éclaircir cette histoire.
"Les fugueurs de Glasgow" (Runaway en
VO) raconte donc deux fugues de l"écosse vers Londres qui se déroulent à
cinquante ans d'intervalle et il n'est pas certain que celle de 2015
soit la moins périlleuse des deux.
L'épopée de 1965 est une quête
initiatique de rockeurs adolescents désireux d'échapper à leurs parents,
à une ville où il ne se passe rien pour rejoindre le Londres des
swinging sixties, des Beatles et autres Bob Dylan en visite européenne.
L'épopée
de 2015 est celle de gériatres plus ou moins malades et désargentés qui
se réveillent de décennies sans intérêt pour vivre une dernière fois
une aventure humaine et faire un pied de nez à leurs enfants,
soignants... Le pauvre gamer trentenaire qui doit les accompagner en
apprendra sans doute davantage sur la vie qu'en 15 ans de jeux en ligne à
mitrailler compulsivement des ennemis virtuels.
Si le
roman est attachant, les quadragénaires un peu curieux et cultivés
n'apprendront rien de vraiment nouveau sur les sixties londoniennes et
les quelques name-droppings n'y changeront rien : le thème de
l'initiation des adolescents à la vie adulte a bien souvent été traité
par ailleurs et dans l’œuvre de Peter May. Les idéaux, le premier amour,
le témoignage de jeunes adultes qui demandent déja une deuxième chance,
la différence entre ceux qui iront jusqu'au bout comme des plus
nombreux qui baisseront les bras...
Le périple des retraités en
quête d’aventure n'est pas une première non plus et même plutôt à la
mode, que ce soit pour s'adresser à un public sans cesse plus nombreux
ou ouvrir des portes de liberté et sortir des poncifs sur la
vieillesse assistée et dépendante.
Mais Peter May n'a pas écrit
autant de romans toutes ces années sans peaufiner son art et , un peu à
la mode Ruth Rendell (rip), il ne s'appuie sur le déroulement parallèle
des deux récits que pour mieux arriver à la fin libératrice. On saura
qui a tué et pourquoi, et combien nos actes de nos dix-huit ans peuvent
avoir des conséquences encore à l'approche de la fin de notre vie. Mais
l'auteur conclut son roman sur des révélations beaucoup plus
intéressantes et émouvantes.
C'est donc pour moi l'occasion de
rajouter "les fugueurs de Glagow" à ma collection presqu' intégrale des
romans de Peter May, un auteur découvert au moment de sa période
"chinoise" et que j'ai encore davantage apprécié par la suite pour la
période "Ecosse/ Iles Hébrides" .
AL.
http://www.theguardian.com/books/2015/jan/26/peter-may-returning-to-a-runaway-youth
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire